Victime et ITT

En sortant de chez lui, Farid a été victime d’une agression. Il a subi un préjudice corporel mais aussi moral, il ne sait pas ce qu’il doit faire. Son ami lui conseille de faire constater son état en toute urgence, notamment pour l’évaluation des ITT. Qu’est-ce que cela signifie ?

Que signifie ITT ?

La notion d’ITT pose une difficulté de compréhension. L’acronyme recouvre en réalité deux notions utilisées en droit pénal et en droit civil dans le cadre de l’évaluation d’un préjudice.

1. Droit pénal

En droit pénal, l’ITT signifie Incapacité Totale de Travail (ITT). C’est une notion juridique qui n’est pas définie par le Code pénal mais qui est précisée par la jurisprudence.

La notion de « travail » renvoie ici à un travail corporel quelconque, l’ITT est donc la période pendant laquelle la victime est dans l’incapacité de se livrer normalement ses activités du quotidien, comme se laver, s’habiller, aller faire ses courses, etc., que ce soit pour des raisons physiques ou psychiques. L’incapacité totale de travail peut donc être constatée pour toutes les personnes, même les enfants.

Une ITT peut survenir à la suite de violences volontaires ou involontaires et elle peut être constatée par un médecin généraliste ou urgentiste selon le choix de la victime ou encore par un médecin légiste de l’Unité Médico-Judiciaire (UMJ) sur réquisition judiciaire.

Le médecin, après avoir examiné la victime, dresse un Certificat Médical Initial (CMI) lequel va fixer en jours ou en mois la durée de l’incapacité totale de travail. Le certificat constatant une ITT fait le rapport de toutes les blessures que le médecin peut constater, il doit décrire de la manière la plus précise possible les lésions constatées lors de l’examen et/ou les douleurs ressenties. L’ITT peut être réévaluée en fonction de l’état de la victime.

Une ITT peut également être constatée en l’absence de blessure physique si la victime a subi un important traumatisme psychologique.

L’ITT est en quelque sorte une unité de mesure utilisée en droit pénal pour quantifier les blessures subies par une victime. C’est une notion essentielle qui permet de qualifier le niveau de gravité de l’infraction.

Il ne faut pas confondre l’ITT avec un arrêt de travail. Un certificat médical constatant une ITT n’est pas équivalent à un arrêt de travail et ne peut donc pas légalement justifier une absence vis-à-vis de son employeur. De plus, il se peut que les deux ne coïncident pas. Par exemple, le médecin qui a examiné une victime de violences légères peut évaluer sur le plan pénal l’ITT à 2 jours, mais considérer que les conséquences psychologiques justifient un arrêt de travail de 5 jours.

2. ITT en droit civil

L’« incapacité totale de travail » diffère de l’ « incapacité temporaire totale », notion remplacée par celle de Déficit fonctionnel temporaire total (DFT) depuis 2006. La constatation du DFT est destinée à réparer la perte de qualité de vie ainsi que celle des joies usuelles de la vie courante (Cour de cassation, 28 mai 2009, n°08-16.829).

Le rapport Dintilhac définit le DFT comme “la période antérieure à la consolidation, pendant laquelle, du fait des conséquences des lésions et de leur évolution, la victime est dans l’incapacité totale de poursuivre les activités habituelles qui sont les siennes, qu’elle exerce, ou non, une activité rémunérée”.

L’indemnisation due après une agression ou un accident de la route se calcule en réalité par le DFT.

Cela permet d’attester véritablement qu’une personne a été victime d’un tel accident ou d’une telle agression et lui donne alors le droit de bénéficier d’une indemnité.

À la suite d’un examen, le médecin détermine le DFT en pourcentage ou en classe :

  • ITT ou GTT : Incapacité Temporaire Totale à 100%
  • ITP ou GTP classe 4 : Incapacité Temporaire Partielle à 75%
  • ITP ou GTP classe 3 : Incapacité Temporaire Partielle à 50%
  • ITP ou GTP classe 2 : Incapacité Temporaire Partielle à 25%
  • ITP ou GTP classe 1 : Incapacité Temporaire Partielle à 10%

Le calcul des indemnités dépend du pourcentage de la gêne totale.

Comment déterminer l’ITT ?

Différents éléments sont pris en compte par le médecin : la durée de la gêne notable dans les activités quotidiennes et usuelles de la victime induite par les blessures ou les troubles (physiques et psychiques) consécutifs aux violences ou blessures subies ; la séparation de la victime de son environnement familial ; le préjudice d’agrément ; le préjudice d’établissement temporaire ; les troubles causés dans les conditions d’existence.

Les éléments à ne pas prendre en compte sont la durée de l’arrêt de travail, la durée d’hospitalisation éventuelle, la situation sociale et professionnelle.

Pourquoi déterminer la durée de l’ITT ?

Lorsque la victime de violences porte plainte, la durée de l’ITT contribue à qualifier l’infraction, donc à déterminer la juridiction compétente pour juger l’auteur des faits (tribunal de police ou tribunal correctionnel) et la peine encourue.

Fixer la durée de l’ITT est donc essentiel pour la bonne poursuite des faits incriminés. Une fois cette période déterminée, il est possible de qualifier l’infraction et déterminer la juridiction compétente. Il faut distinguer les violences volontaires et les violences involontaires.

1. Violences volontaires

Il s’agit de violences infligées de manière intentionnelle à une victime, elles peuvent être physiques (coups) ou psychologiques (menaces, harcèlement…) et sont sanctionnées de la même manière.

Violences n’ayant entrainé aucune ITT ou ITT inférieure ou égale à 8 jours
  • Les violences n’ayant entraîné aucune ITT sont les violences dites légères. Elles supposent une atteinte à l’intégrité d’autrui mais la victime n’est pas gênée pour accomplir les tâches de la vie quotidienne. Hors les cas prévus par les articles 222-13 et 222-14 du Code pénal (circonstances aggravantes), il s’agit de simples infractions de police punies de l’amende prévue pour les contraventions de la 4ème classe (750 euros d’amende). Une peine complémentaire peut aussi être prévue telle que suspension de permis ou confiscation de la chose ayant servi à commettre l’infraction (article R624-1 Code pénal).
  • En cas d’ITT inférieure ou égale à 8 jours, l’auteur risque une contravention de la 5ème classe (1500 euros).

Dans les deux cas (ITT nulle ou inférieur à 8 jours) l’infraction peut se transformer en délit punissable de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende à raison des circonstances aggravantes : si elles sont commises par exemple sur un mineur de quinze ans, sur une personne vulnérable, sur un ascendant etc. (art 222-13 Code pénal). Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsque cette infraction est commise dans deux des circonstances prévues aux 1° et suivants de l’article 222-13 du Code pénal. Les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende lorsqu’elle est commise dans trois de ces circonstances.

ITT supérieure ou égale à 8 jours : délit (tribunal correctionnel)

L’auteur de ces violences encourt une peine d’emprisonnement de trois ans, et une amende de 45 000 euros (art 222-11 Code pénal).

Les sanctions encourues sont portées à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 d’amende, lorsque cette infraction de violence se voit commise avec l’une des circonstances aggravantes ou encore à 7 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende lorsque en cas de deux circonstances aggravantes (article 222-12 Code pénal).

Exemples de circonstances aggravantes :

En cas d’infraction qualifiée de crime par la loi, c’est la Cour d’assises qui est compétente même si l’ITT est inférieure ou égale à 8 jours.

2. Violences involontaires

Les violences involontaires sont celles commises de manière non intentionnelle, elles sont le résultat d’une maladresse ou d’un manquement à une obligation légale de sécurité de la part de l’auteur. Exemple : un conducteur en excès de vitesse renverse un passant.

Les peines dépendent de la gravité du préjudice et de la nature et de l’importance de la faute. Les peines peuvent être plus lourdes si les faits sont commis dans des circonstances aggravantes.

  • Incapacité totale de travail (ITT) inférieure ou égale à 3 mois (tribunal de police) :
    Il s’agit d’une contravention de la 5ème classe, soit 1 500 € d’amende (3 000 € en cas de récidive). L’auteur risque aussi des peines complémentaires.
  • Incapacité totale de travail (ITT) de plus de 3 mois (tribunal correctionnel) :
    Il s’agit d’un délit punissable de 2 ans de prison et 30 000 € d’amende. L’auteur risque aussi des peines complémentaires.
En cas de violation délibérée d’une obligation particulière de sécurité prévue par la loi :
  • Si la victime n’a aucune lésion ou blessure, l’auteur risque 1 500 € d’amende (3 000 € en cas de récidive).
  • En cas d’Incapacité totale de travail (ITT) de moins de 3 mois :
    L’auteur risque 1 an de prison et 15 000 € d’amende ainsi que des peines complémentaires.
  • En cas d’ITT de plus de 3 mois :
    L’auteur risque 3 ans de prison et 45 000 € d’amende ainsi que des peines complémentaires.
En cas d’une infraction commise par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur :
  • Incapacité totale de travail (ITT) de moins de 3 mois :
    L’auteur risque 2 ans de prison et 30 000 € d’amende ainsi que des peines complémentaires comme annulation de permis de conduire.
  • Incapacité totale de travail (ITT) de plus de 3 mois :
    L’auteur risque 3 ans de prison et 45 000 € d’amende ainsi que des peines complémentaires comme annulation de permis de conduire.

RÉFÉRENCES APPLICABLES :

Code pénal : articles 222-7 à 222-16-3 (peines en cas de violences volontaires) ; articles 222-19 à 222-21(peines en cas de violences involontaires) ; article R622-1 (peines pour violences involontaires n’ayant causé aucune blessure) ; article R624-1 (peines pour violences volontaires légères ; article R625-1 (peines pour violences volontaires avec ITT de plus de 8 jours) ; articles R625-2 à R625-6 du Code pénal.

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